Prix : EUR 26,00
This review is from : Les espions : réalités et fantasmes
Le substantif le subjectif et l'adjectif .
Commenons par le substantif.Un livre intéressant qui essaie de démystifier les clichés, celui du super-espion vivant dans le luxe et flinguant à tout propos (genre James Bond, mais a, on s'en doutait) et surtout celui de la toute-puissance des organes , dont l'auteur montre que leur impact sur le cours de l'histoire ne s'exerce qu'à la marge. Son principal mérite est d'expliquer comment l'action des services secrets n'est efficace que si elle s'inscrit dans le cadre d'une politique cohérente et pertinente sur les plans diplomatique, militaire, industriel, etc. Il souligne en outre l'importance de la continuité (il faut des années pour construire un dispositif performant), mais aussi de la cohésion sociale des nations et de la force des motivations (il faut un courage exceptionnel pour affronter les risques du travail de terrain en territoire adverse). Il montre surtout le rle-clef du couple formé par l'officier traitant (selon l'appellation habituelle, à laquelle il préfère celle d' oper ) et son informateur, sans lequel les analyses les plus brillantes effectuées par les Centrales tournent à vide faute de renseignements valables. Il révèle enfin la médiocrité des services de renseignement de beaucoup de pays, de la 2e Guerre mondiale à la Guerre froide : seules l'URSS de la grande époque et la Grande-Bretagne ont su mettre en place des organisations performantes, alors que les succès de la CIA et des services franais doivent beaucoup plus à la chance qu'à leur performance intrinsèque. Mutisme total, en revanche, sur le Mossad ...Et maintenant, le subjectif.A ce titre, deux points méritent d'tre signalés : l'hostilité (qui confine à l'obsession) de l'auteur à l'égard de l'emprise des militaires sur les services de renseignements (il me semble qu'il succombe lui-mme à un cliché, celui du manque de subtilité et d'imagination des militaires de carrière, ce qui est souvent vrai mais pas toujours) ; une certaine fascination qu'il semble éprouver pour la "foi" communiste et sa capacité mobilisatrice (et qui, d'ailleurs, n'est pas contradictoire avec la répulsion qu'il manifeste vis-à-vis du communisme réel pratiqué par le système soviétique).Cela dit, on peut exprimer deux réserves (d'où la note de 3 étoiles) dont une affecte sérieusement l'intért de l'ouvrage et l'autre nuit au plaisir de lecture :(1) l'auteur, qui déclare n'avoir jamais participé à la conception ni à l'exécution d'opérations de renseignement (il récuse les allégations contraires apparaissant sur certains sites Internet), connat pourtant bien, à l'évidence, le monde du renseignement et en a une expérience concrète à travers son activité d'analyste (à la Rand et au cabinet de Debré) ; il a également eu l'occasion d'avoir connaissance d'opérations concrètes à travers les opérationnels qu'il a fréquentés. Or, son ouvrage est exclusivement basé sur des dépouillements d'archives et il ne livre aucune révélation sur aucune des opérations dont il a eu à connatre à titre professionnel ou par relations personnelles, mme fort anciennes, comme celles du réseau de Marie-Madeleine Fourcade pendant la Seconde guerre mondiale (il s'en explique page 436). Cela prive le lecteur de la dimension de vécu qu'on pourrait attendre d'un livre écrit par un ex-praticien. Reconnaissons que c'est un travers commun des anciens membres de la communauté du renseignement (à croire qu'il n'y a jamais de prescription en la matière !), mais reconnaissons aussi que cela lui enlève le droit de déplorer que les services n'ouvrent leurs archives que de faon sélective (limitée aux affaires déjà médiatisées à l'occasion, par exemple, de procédures judiciaires), alors que lui-mme censure ses propres souvenirs !(2) le style manquant de sobriété. Avec ses phrases alambiquées, limite kitsch , et la surabondance des adjectifs ( l'immense Markus Wolf , etc.), on a quelquefois du mal à comprendre ce qu'il veut vraiment dire. Rien qu'en supprimant la moitié des adjectifs, il aurait été possible d'alléger le livre d'une trentaine de pages et de sauver quelques arbres.Pour terminer, l'ouvrage présente trois bizarreries qui méritent d'tre signalées :- un de ses thèmes récurrents consiste à mettre en garde contre l'amalgame (courant dans les polars comme dans la production journalistique) entre l'activité de renseignement proprement dit et les barbouzeries et autres opérations spéciales (en général pratiquées par des organismes distincts). Mais on a l'impression que la distinction, sur laquelle l'auteur insiste tout au long des pages, entre les deux catégories d'activités est surtout conceptuelle et normative. Dans la pratique réelle, la frontière est-elle aussi étanche ? À cette question, le livre n'apporte pas une réponse décisive.- la composition d'ensemble apparat assez curieuse : après le développement principal, qui accumule les faits, parfois de faon anecdotique, c'est seulement dans l'Annexe I (qui se présente sous la forme d'un lexique des termes courants du métier) que l'auteur théorise, du reste avec une finesse de raisonnement et une hauteur de vue admirables.- dans l'Annexe III, (Littérature et espionnage), l'auteur évoque seulement James Bond et Le Carré, mais pas un mot sur Graham Greene, ni sur Vladimir Volkoff, sans doute le plus talentueux des romanciers d'espionnage et, comme Constantin Melnik, issu de l'immigration russe blanche. Pourquoi ce silence, à l'évidence volontaire ?Tout a fait, au final, un livre passionnant malgré ses notables défauts (et ma note de 3 étoiles), dont on ne peut que recommander la lecture à tous ceux que ces questions intéressent, tout en gardant son esprit critique (mais n'est-ce pas vrai de toutes les lectures ?).
Le substantif le subjectif et l'adjectif .
Commenons par le substantif.Un livre intéressant qui essaie de démystifier les clichés, celui du super-espion vivant dans le luxe et flinguant à tout propos (genre James Bond, mais a, on s'en doutait) et surtout celui de la toute-puissance des organes , dont l'auteur montre que leur impact sur le cours de l'histoire ne s'exerce qu'à la marge. Son principal mérite est d'expliquer comment l'action des services secrets n'est efficace que si elle s'inscrit dans le cadre d'une politique cohérente et pertinente sur les plans diplomatique, militaire, industriel, etc. Il souligne en outre l'importance de la continuité (il faut des années pour construire un dispositif performant), mais aussi de la cohésion sociale des nations et de la force des motivations (il faut un courage exceptionnel pour affronter les risques du travail de terrain en territoire adverse). Il montre surtout le rle-clef du couple formé par l'officier traitant (selon l'appellation habituelle, à laquelle il préfère celle d' oper ) et son informateur, sans lequel les analyses les plus brillantes effectuées par les Centrales tournent à vide faute de renseignements valables. Il révèle enfin la médiocrité des services de renseignement de beaucoup de pays, de la 2e Guerre mondiale à la Guerre froide : seules l'URSS de la grande époque et la Grande-Bretagne ont su mettre en place des organisations performantes, alors que les succès de la CIA et des services franais doivent beaucoup plus à la chance qu'à leur performance intrinsèque. Mutisme total, en revanche, sur le Mossad ...Et maintenant, le subjectif.A ce titre, deux points méritent d'tre signalés : l'hostilité (qui confine à l'obsession) de l'auteur à l'égard de l'emprise des militaires sur les services de renseignements (il me semble qu'il succombe lui-mme à un cliché, celui du manque de subtilité et d'imagination des militaires de carrière, ce qui est souvent vrai mais pas toujours) ; une certaine fascination qu'il semble éprouver pour la "foi" communiste et sa capacité mobilisatrice (et qui, d'ailleurs, n'est pas contradictoire avec la répulsion qu'il manifeste vis-à-vis du communisme réel pratiqué par le système soviétique).Cela dit, on peut exprimer deux réserves (d'où la note de 3 étoiles) dont une affecte sérieusement l'intért de l'ouvrage et l'autre nuit au plaisir de lecture :(1) l'auteur, qui déclare n'avoir jamais participé à la conception ni à l'exécution d'opérations de renseignement (il récuse les allégations contraires apparaissant sur certains sites Internet), connat pourtant bien, à l'évidence, le monde du renseignement et en a une expérience concrète à travers son activité d'analyste (à la Rand et au cabinet de Debré) ; il a également eu l'occasion d'avoir connaissance d'opérations concrètes à travers les opérationnels qu'il a fréquentés. Or, son ouvrage est exclusivement basé sur des dépouillements d'archives et il ne livre aucune révélation sur aucune des opérations dont il a eu à connatre à titre professionnel ou par relations personnelles, mme fort anciennes, comme celles du réseau de Marie-Madeleine Fourcade pendant la Seconde guerre mondiale (il s'en explique page 436). Cela prive le lecteur de la dimension de vécu qu'on pourrait attendre d'un livre écrit par un ex-praticien. Reconnaissons que c'est un travers commun des anciens membres de la communauté du renseignement (à croire qu'il n'y a jamais de prescription en la matière !), mais reconnaissons aussi que cela lui enlève le droit de déplorer que les services n'ouvrent leurs archives que de faon sélective (limitée aux affaires déjà médiatisées à l'occasion, par exemple, de procédures judiciaires), alors que lui-mme censure ses propres souvenirs !(2) le style manquant de sobriété. Avec ses phrases alambiquées, limite kitsch , et la surabondance des adjectifs ( l'immense Markus Wolf , etc.), on a quelquefois du mal à comprendre ce qu'il veut vraiment dire. Rien qu'en supprimant la moitié des adjectifs, il aurait été possible d'alléger le livre d'une trentaine de pages et de sauver quelques arbres.Pour terminer, l'ouvrage présente trois bizarreries qui méritent d'tre signalées :- un de ses thèmes récurrents consiste à mettre en garde contre l'amalgame (courant dans les polars comme dans la production journalistique) entre l'activité de renseignement proprement dit et les barbouzeries et autres opérations spéciales (en général pratiquées par des organismes distincts). Mais on a l'impression que la distinction, sur laquelle l'auteur insiste tout au long des pages, entre les deux catégories d'activités est surtout conceptuelle et normative. Dans la pratique réelle, la frontière est-elle aussi étanche ? À cette question, le livre n'apporte pas une réponse décisive.- la composition d'ensemble apparat assez curieuse : après le développement principal, qui accumule les faits, parfois de faon anecdotique, c'est seulement dans l'Annexe I (qui se présente sous la forme d'un lexique des termes courants du métier) que l'auteur théorise, du reste avec une finesse de raisonnement et une hauteur de vue admirables.- dans l'Annexe III, (Littérature et espionnage), l'auteur évoque seulement James Bond et Le Carré, mais pas un mot sur Graham Greene, ni sur Vladimir Volkoff, sans doute le plus talentueux des romanciers d'espionnage et, comme Constantin Melnik, issu de l'immigration russe blanche. Pourquoi ce silence, à l'évidence volontaire ?Tout a fait, au final, un livre passionnant malgré ses notables défauts (et ma note de 3 étoiles), dont on ne peut que recommander la lecture à tous ceux que ces questions intéressent, tout en gardant son esprit critique (mais n'est-ce pas vrai de toutes les lectures ?).
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Product Details
EAN : 9782729838256Weight : 3 pounds
Height : 2 inches
Length : 10 inches
Width : 7 inches
Author : Constantin Melnik
Binding : Broché
Manufacturer : MARKETING-ELLIPSES
PublicationDate : 2008-05-15
Publisher : MARKETING-ELLIPSES
SKU : TL2729838252
Studio : MARKETING-ELLIPSES
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